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11 septembre 2010 6 11 /09 /septembre /2010 16:56

Contrairement à une idée reçue, les Etats-Unis d’Amérique ont été le premier Etat à proclamer la séparation de l’Etat et des pouvoirs publics. Le premier amendement à la Constitution américaine du 17 septembre 1787 prévoit ainsi que « le Congrès ne fera aucune loi qui touche l’établissement ou interdise le libre exercice d’une religion (…) ». Cette limitation des rapports entre Etat et religions est loin d’être absolue mais représente le premier obstacle à l’immixtion du pouvoir politique dans l’exercice de la liberté de conscience.

 

En France, la séparation entre l’Etat et les religions a été consacrée par la Constitution du 4 octobre 1958. Son article 1er proclame ainsi que la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Ce texte est l’aboutissement d’une longue évolution dont l’étape majeure est l’adoption de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l’Etat. L’article 2 de ce texte dispose ainsi que « la République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte ». Les autorités politiques françaises sont donc tenues d’adopter vis-à-vis des cultes une indifférence bienveillante.  

 

Cependant, un texte semble fragiliser le mythe de l’Etat laïc en France. Le préambule de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 comprend une phrase rédigée en ces termes : « En conséquence, l’Assemblée Nationale reconnaît et déclare, en présence et sous les auspices de l’Etre suprême, les droits suivants de l’Homme et du Citoyen ». Or, depuis la décision du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1971 relative à la liberté d’association, la Déclaration de 1789 dispose d’une valeur juridique indéniable puisque le Conseil accepte de contrôler la conformité des lois votées par le Parlement au bloc de constitutionnalité, c'est-à-dire non seulement aux articles constitutionnels, mais également aux textes auxquels renvoie le préambule de la Constitution de 1958. Le Conseil pourrait donc vérifier qu’une loi ne contredit pas l’affirmation selon laquelle existerait un « Etre suprême »…

 

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13 août 2010 5 13 /08 /août /2010 16:20

La température, adaptée à l'organisme humain pendant le travail (art. R.4213-7), nous remet vite d'aplomb. Nous sommes bien décidés à poursuivre notre visite. Après quelques pas, Jean-Denis s'arrête soudain, ferme les yeux en affichant un sourire béat. L'index levé : "N'est-il pas plaisant de travailler dans des locaux au sein desquels le niveau sonore quotidien ne dépasse jamais 85 dB ?" (art. R.4213-5). Nous remarquons en effet que les lieux sont conçus de manière à réduire la réverbération du bruit sur les parois et à limiter la propagation du bruit vers les autres locaux occupés par des travailleurs (art. R.4213-5 1° et 2°).

 

Dans les bureaux, de larges fenêtres disposées à hauteur des yeux (art. R.4213-3), permettent aux salariés d'accomplir leurs activités à la lumière d'un éclairage naturel (art. R.4213-2). De petites lampes de bureau sont installées aux postes de travail afin d'éviter la fatigue visuelle et les affections de la vue qui en résultent (art. R.4223-2).

 

A l'intérieur de chaque salle, l'air est doux et agréable comme si les fenêtres avaient été ouvertes un matin de printemps. "C'est le cas !", s'écrie Jean-Denis. "Le volume par occupant étant égal à 15 mètres cubes dans les bureaux, nous procédons à une ventilation naturelle, assurée exclusivement par ouverture des fenêtres donnant directement sur l'extérieur" (art. R.4222-5). "Aaah... bon...".

 

Perplexes, nous en oublions une envie présente et sommes rattrapés par la nécessité de trouver le lieu adéquat. "Les toilettes ?! Venez, je vous accompagne". "euh...ce n'est pas...nécessaire...je...". Mais Jean-Denis s'est déjà élancé. L'établissement accueillant un personnel mixte "il est évident que nous disposons de cabinets d'aisance séparés" (art. R.4228-10). En ouvrant la porte menant aux "cabinets d'aisance" réservés aux hommes, toujours suivis de Jean-Denis, nous remarquons cinq urinoirs et cinq cabinets. Et notre guide de nous expliquer que chacun des cinq étages comporte le même type d'équipement, soit vingt-cinq urinoirs et vingt-cinq cabinets (art. R.4228-10). Préférant nous isoler, et soulagés de nous retrouver seul un moment, nous entendons à travers la porte Jean-Denis mettre en avant la présence de chasse d'eau et de papier hygiénique (art. R.4228-11). "Merci...euh...Jean-Denis". Alors que nous nous apprêtons à quitter ces lieux, le personnel d'entretien pénètre dans la pièce pour procéder au nettoyage et à la désinfection quoitidienne des locaux (art. R.4228-13).

 

Mais il se fait déjà tard et notre hôte doit se hâter d'aller déjeuner. Il nous propose de se joindre à lui. Enthousiaste, nous dégainons un gros jambon-buerre en nous installant dans un bureau vide. "Prohibé !" (art. R.4228-19), s'exclame le jeune cadre avec un sourire taquin. Après avoir jeté le jambon-buerre, il s'élance vers le rez-de-chaussée et rejoint à toute allure le restaurant de l'entreprise. Nous courrons derrière.

 

"Bon ben... on se sert alors". Un petit remontant ne serait pas de refus. "Vin, bière, cidre, poiré, vous n'avez qu'à choisir" (art. R.4228-20) nous lance JD. "Un petit rhum peut être...". "Prohibé ! Ahah"... (art. R.4228-20). "Ah oui...prohibé...".

 

Il est maintenant temps de nous quitter. Jean-Denis nous raccompagne, tout en faisant mine de s'étonner de l'absence d'émanation provenant d'égouts, fosses, puisards, fosses d'aisances depuis l'origine de l'installation (art. R.4222-18). "Bah oui...parce que ça pue drôlement sinon..." rétorquons-nous. 

 

"Mais vous savez, le plus important c'est que les locaux garantisse la sécurité des travailleurs (art. L.4221-1)" ajoute Jean-Denis en nous tendant une main d'une propreté éclatante.

 

Sur ces paroles d'une sagesse pénétrante, nous quittons ce lieu enchanteur en espérant qu'un jour peut être, nous aussi, nous disposerons d'une armoire ininflammable permettant de suspendre deux vêtements de villes (art. R.4228-6).

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12 août 2010 4 12 /08 /août /2010 13:46

Jean-Denis est un jeune cadre dynamique, ambitieux et désinvolte, qui travaille dans une belle entreprise de la région parisienne. Cette entreprise vient de recevoir le Prix Utopia, décerné par l’inspection du travail aux établissements respectant le plus scrupuleusement les dispositions législatives et réglementaires en matière de conditions de travail. Jean-Denis accepte avec fierté de nous faire visiter cet antre du bien-être professionnel (durant sa pause de 20 minutes à l’issue de 6 heures de travail, cela va de soi), code du travail à la main.

 

En arrivant au siège de notre vertueuse structure, nous constatons que les voies de circulation permettant d’accéder au parking permettent aux piétons et aux véhicules d’accéder facilement, en toute sécurité, aux lieux de travail (art. R.4214-8). 


L’entreprise au sein de laquelle Jean-Denis exerce son activité a aménagé ses locaux dans un superbe bâtiment moderne, réalisé de manière à pouvoir résister à l’effet combiné de son poids, des charges climatiques extrêmes et des surcharges maximales correspondant à son utilisation (art. R.4214-1 al.1). De la majesté qui émane de ce joyau architectural, nous concluons que les lieux présentent la solidité nécessaire à l’usage qui en est fait (art. R.4224-2). Notre sympathique accompagnateur ajoute presque en riant que bien évidemment le bâtiment respecte les règles antisismiques prévues par les normes en vigueur (art. R.4214-1 al.2). En levant les yeux, nous apercevons une équipe de nettoyeurs occupés au lavage des vitres, lesquelles sont conçues pour favoriser cette opération en toute sécurité (art. R.4214-2).


Nos premiers pas dans le hall, nous permettent de profiter du confort qu’offre un plancher stable et non glissants, exempt de bosses, de trous et de plans inclinés dangereux (art. R.4214-3). Abasourdis par cette constatation, nous ne remarquons pas que le portail de l’entrée s’est interrompu automatiquement lorsqu’un salarié l’a doucement heurté par inadvertance, déclenchant par la même le système de sécurité, et permettant au collègue qui le suit de ne pas subir un dommage inopportun (art. R.4214-8). Notre hôte s’empresse d’ajouter que naturellement l’ensemble des portails automatiques fonctionnent sans risque d’accident pour les travailleurs (art. R.4224-13).


Bien que l’entreprise comporte des ascenseurs, Jean-Denis souhaite nous faire profiter du magnifique escalier menant aux étages supérieurs. Ce dernier est muni de deux rampes, « puisque sa largeur excède 1,5 mètre » (art. R.4227-10) commente un collègue de « JD » alors que celui-ci nous présente les éclairages de sécurité permettant d’assurer l’évacuation des personnes en cas d’interruption accidentelle de l’éclairage normal (art. R.4227-14). « Ah ouai… Sacrément bien fichu », nous contentons-nous d’affirmer.


Arrivé au premier étage, nous passons devant le local destiné aux premiers secours mis en place depuis que la florissante affaire rassemble plus de cinq cents salariés (art. R.4214-23). Un collaborateur pris d’un léger malaise sort de cette pièce, à travers une porte suffisamment large pour permettre le passage de son brancard (art. R.4214-23), un verre d’eau potable et fraîche, mis à la disposition par l’employeur, à la main (art. R.4225-2).


En pénétrant dans le premier bureau sur notre gauche, nous sommes agréablement surpris de voir des salariés se déplacer avec une liberté de mouvement suffisante (art. R.4214-22 al.2) dans des locaux aménagés de manière à assurer le bien-être du personnel (art. R.4214-22 al.1). Etonnés, nous observons que chaque travailleur dispose d’un siège approprié, mis à sa disposition par l’employeur (art. R.4225-5).


Estomaqués, nous nous accordons un court instant de répit dans l'atmosphère propre et purifiée du couloir (art. R.4222-1)…

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10 août 2010 2 10 /08 /août /2010 13:59

Selon une idée fort répandue, De Gaulle serait "le père" de la sécurité sociale en France. Si le Général a effectivement promulgué les textes instaurant le dispositif actuel de sécurité sociale, ce dernier trouve ses racines juridiques dans les premières années de la Révolution française.


Des secours publics à la charité individuelle

 

Les pouvoirs publics n'ont pas attendu le milieur du 20ème siècle pour intervenir en matière sociale. A la fin du 18ème siècle, les révolutionnaires français, motivés par des considérations d'ordre politique et philosophique, posèrent les jalons de la législation sociale en France. En 1794, la Convention nationale adoptait un décret (décret du 22 floréal an II) prévoyant la création d'un "Livre de la bienfaisance nationale", lequel permettait aux citoyens dont le nom y était transcrit de bénéficier d'un secours. Ce dispositif, instauré sous l'impulsion de Barère, qui avait affirmé que "dans une démocratie, tout doit tendre à élever chaque citoyen au-dessus du premier besoin, par le travail s'il est valide, par l'éducation s'il est enfant, et par les secours s'il est invalide ou dans la vieillesse", allait rapidement décevoir les attentes qu'il avait suscitées.


Accaparés par les difficultés politiques, économiques et diplomatiques, les premiers républicains ne disposaient pas des moyens nécessaires à la concrétisation de leurs ambitions en matière de progrès social. Cependant, d’un point de vue théorique, la période est maquée par une rupture considérable : pour la première fois, le constituant met à la charge de la collectivité une obligation envers les personnes qui se trouvent dans le besoins. En effet, l’article 21 de la Constitution du 24 juin 1793 prévoyait que « les secours publics sont une dette sacrée. La société doit la subsistance aux citoyens malheureux, soit en leur procurant du travail, soit en assurant les moyens d’exister à ceux qui sont hors d’état de travailler ». L’idée de sécurité sociale est ici sous-jacente puisqu’il s’agit de fournir à la personne qui se trouve dans l’impossibilité de vivre de son travail, une indemnisation. La Constitution du 22 août 1795 revient largement sur ce principe et se contente de renvoyer à la charité de tous suivant la maxime consacrée par l'article 2 de ses Devoirs : « Faites constamment aux autres le bien que vous voudriez en recevoir ».

 

Du libéralisme aux assurances sociales

 

Le 19ème siècle sera marqué par une faible intervention de l’Etat dans la sphère sociale, à l’exception notable mais éphémère de la Seconde République dont la Constitution (Constitution du 4 novembre 1848)   proclamait que la nation « doit, par une assistance fraternelle, assurer l’existence des citoyens nécessiteux, soit en leur procurant du travail dans les limites de ses ressources, soit en donnant, à défaut de la famille, des secours à ceux qui sont hors d’état de travailler » (article VIII du Préambule). Malgré cette parenthèse, le libéralisme prône une abstention des pouvoirs publics en matière sociale. Adolphe Thiers ira même jusqu’à affirmer que « reconnaître aux pauvres un droit à l’aumône c’est les autoriser à exiger l’aumône par la force ; c’est anéantir le droit de propriété et marcher à la communauté des biens ».


Ce n’est qu’à la fin du 19ème siècle, sous la Troisième République, qu’un véritable système de sécurité sociale va être mis en place. S’inspirant du principe de la mutualisation des risques sociaux, le législateur décide d’instaurer en France un mécanisme largement influencé par la législation promulguée par le chancelier allemand Otto von Bismarck entre 1883 et 1889. Après un long travail préparatoire et l’adoption de plusieurs textes catégoriels, la loi du 30 avril 1930 instaure un régime général de sécurité sociale à destination des travailleurs salariés.


A l’aube de la Seconde guerre mondiale, la France dispose donc d’un véritable mécanisme de sécurité sociale dont l’application se heurtera à un certains nombre de difficultés pratiques. Durant la Guerre, le 15 mars 1944, le Conseil national de la Résistance (CNR) adopte un programme d’action prévoyant « un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se le procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l’Etat ».

 

L’ordonnance n° 45-2250 du 4 octobre 1945 portant organisation de la sécurité sociale, signée par le Général De Gaulle, décline en droit français les principes arrêtés par les membres du CNR. Ce texte réorganise le système des années 1930 en lui ajoutant une caractéristique essentielle : la gestion du dispositif par les représentants des assurés sociaux, c'est-à-dire les organisations syndicales de salariés et d’employeurs.

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